QUEL AVENIR POUR LE CATHOLICISME AU 21ème SIECLE?(Fin) 
Extrait de "Silence sur l'essentiel" Jean Guitton

Je me souviens qu'en 1935, élève à l'Ecole biblique de Jérusalem, j'entendais la dernière leçon du Père Lagrange. Il disait que l'œuvre du salut avait commencé avec le clan d'Abraham, tout " petit reste ". Il n'avait pas de peine à montrer que ce clan s'était maintenu à travers les catastrophes, que toujours avait reparu un " petit reste ", c'est-à-dire : un germe. Puis, s'étant tu longtemps, et ayant levé les yeux, le Père Lagrange ajouta : " Il n'est pas impossible que l'aventure humaine reparte, comme elle a commencé, par un petit reste. Jésus n'a pas tenu pour invraisemblable qu'à son retour ultime, il trouve peu de foi sur la terre. "

A quoi bon gagner l'univers, remplir l'espace, occuper le temps, si " l'on perd son âme ", c'est à dire l'essentiel ?
L'inventeur a raison contre tous. Songeons à Galilée, à Pasteur, à Einstein. Songeons aussi qu'on se souvient de Pascal plus que de Louis XIV, et de saint Vincent de Paul plus encore que de Pascal. Dans chaque ordre de grandeur la qualité prévaut, c'est à dire : l'éternité. Et qu'est-ce qu'avoir la foi, sinon garder l'invincible espérance que, maintenant ou demain, dans ce monde-ci ou dans un autre monde, après de longues vicissitudes ou dans un seul instant, le Bien sera vainqueur ? Tous les esprits, qu'ils soient athées, qu'ils soient croyants, communient dans cette espérance. Ou, s'ils la repoussent, par désespoir, ils se retranchent des vivants. Survivants ou suicidés, ils ont le sentiment, surespérant ou désespéré, que les plus grandes réussites de la vie sont du côté des plus grands risques.

J'envisage donc avec confiance ce 21ème siècle j'envie même la génération qui monte. Je l'envie, parce que cette génération aura la charge la plus grande qui puisse se proposer à des êtres libres : celle de livrer un combat décisif, d'une part ; et, d'autre part, celle d'être sûre, absolument sûre, de n'être pas vaincue.

Je ne vois pas de crise dans l'histoire qui soit comparable à celle que va connaître le 21ème siècle. Nous avançons vers des transformations majeures, vers des événements imprévisibles, d'une importance inouïe.

Comme Newman à la fin du 21ème siècle, mais plus encore, je prévois une confrontation ultime entre les positions extrêmes de l'affirmation et de la négation. Nous allons voir s'effacer les positions intermédiaires, prudentes, " bourgeoises " et se présenter face à face, dialectique contre dialectique : athéisme et christianisme, un " humanisme athée ", un catholicisme authentique.
Les journaux, les télévisions nous condamnent à l'apparence, en se taisant sur l'essentiel. Les discours des chefs sont balancés, pour laisser place aux deux possibilités. Sous ces apparences et sous ces prudences, nous avançons vers l'avenir. Les conflits diplomatiques, stratégiques ou politiques voilent un conflit fondamental, qui est d'ordre métaphysique, d'ordre religieux. Comme l'a dit Malraux, le 21ème siècle sera religieux ou ne sera pas.

Quant à moi, je suis convaincu, non par la foi mais par un examen raisonnable des convergences, que l'avenir est favorable au catholicisme. Je ne vois pas sur cette planète d'autre religion plus universelle, plus apte à se proposer aux élites comme aux masses, à récapituler le passé, à préparer l'avenir, à conduire les êtres libres du temps à l'éternité.

Dans le moment confus que nous appelons " temps présent ", nul ne peut savoir ce qui est cendre et ce qui est essence, ce qui est poussière et ce qui est germe.

Le catholicisme bien compris (rajeuni comme l'a fait le dernier concile) présente à l'ère nucléaire la seule possibilité réelle d'unir les solitudes et les multitudes, de rassembler (comme l'espérait Marthe Robin) l'humanité entière, " dans l'éternel amour et dans l'unité ". 

   
  accueil | Marie, rue du Bac | Sainte Thérèse de l'Enfant Jésus | Jean Guitton, philosophe|
  Extraits et textes | Sites à découvrir | Me contacter |

Marie, rue du Bac 1999